lundi 4 janvier 2010

Comment faire un ligneul.

bonjour,

Dans tous les exemples et dans toutes les vidéos que j'ai eu l'occasion de voir, pour une couture main, pour un passage en trépointe, un petit point, un norvégien, etc...mais par contre comme je l'ai déjà dit dans d'autres messages, jamais de couture dehors en dedans, à croire que les artisans ne veulent pas ou ne savent plus le faire, toutes étaient faites avec des fils préparés en industrie, cirés poissé, mais jamais fait à la main, l'extrémité écrasée, déchiquetée de différentes manières avec différents outils pour l'affiner, et permettre le passage de l'aiguille.

Mais jamais fait par l'artisan, aux nombre de brins ( j'ai entendu parler de coron, c'est une appellation que je ne connais pas ) voulus selon la couture à faire et l'épaisseur à coudre, à la longueur nécessaire obtenue par le nombre de brasses, torsadé, poissé, avec cette poix noire qui à la couture forme une véritable soudure par le mélange des deux fils noués qui se solidifient par le refroidissement de la poix mélangée, aux extrémités préparées et obtenues fines comme un cheveu, pour la pose des soies de porc.

Le nombre de brasses du ligneul est conditionné par la longueur de la couture à faire, homme ou femme, blake, norvégien, goodyear, petit point, donc si la couture est faite jusqu'à la cambrure, ou fait le tour de la chaussure " baraquette " et si le procédé de montage possède une double ou pas. Une brasse, pour des souliers de femme, une brasse et demie voir deux pour des souliers d'homme, rarement plus.
En règles générales, selon l'épaisseur et la longueur, il faut compter cinq à six fois la longueur à coudre, plus dix à vingt centimètres selon l'aminci pour la pose des soies, en fonction du nombre de brins. Une brasse représente la longueur des deux bras tendus, la demie brasse, d'une main jusqu'au menton.
Le nombre de brins, les critères sont un peu différents et moins nombreux, c'est surtout, le côté homme ou femme qui est à prendre en considération et donc l'épaisseur du matériau. Il est au nombre de cinq pour les coutures les plus fines, jamais moins, et jusqu'à dix voir douze pour les coutures les plus épaisses, je n'ai jamais vu plus.
Le fil n'est jamais coupé , mais détorsadé sur le genou droit main droite, et vice et versa pour un gaucher, il est tiré de l'autre, il s'effiloche à sa rupture permettant ainsi une finition aussi fine qu'un cheveu, d'autant plus que chaque longueur sera décalée à chaque fois de deux à trois centimètres, en plus et en moins, d'un côté puis de l'autre. Nos maîtres d'apprentissages ne s'accommodaient pas de cette nouvelle manière de faire qui consiste à écraser, ou à taper pour faire ce semblant d'aminci, pour le bout du fil d'industrie, procédé utilisé par les plus grands bottiers.
Un ligneul fait à la poix véritable noire, ne peut, je l'ai dit se comparer avec un fil d'industrie, quelques soient ses qualités, une couture faite avec ces ligneuls ne peut se découdre avec l'usure de la marche, et tient jusqu'au bout la semelle d'usure. D'ailleurs certains artisans ne voient pas nécessité et déconseillent de nouer le point, ce que personnellement je ne préconise pas. Nouer le point est tellement simple, pourquoi s'en priver.
A ce stade le fil brut, pelucheux doit être ébarbé et lissé, une bonne manière est de lui faire faire une boucle autour d'un objet rond et lisse ( clanche de porte, manivel de machine ) une extrémité dans chaque main, de lui faire faire des va et vient par portion, sur toute sa longueur.
Le fil terminé, il est ensuite roulé, modérément cette première fois pour permettre de poisser le plus possible l'intérieur du fil. Il est pour cela plier en deux sur une pointe dans l'établi ou sur tous autres point d"encrage, comme pour la première opération, avec la paume de la main toujours sur le genou.
la poix a été auparavant malaxée avec les mains pour la ramollir et la rendre utilisable, mais elle peut être aussi chauffée au bain marie. Le bloc de poix tenu d'une main, le fil est passé dessus très rapidement tenu par le pouce, les brûlures sont monnaies courantes. l'échauffement provoque la fonte de la poix qui pénètre dans le fil.
Il faut le lisser, un petit morceau de peausserie est découpé, le fil passé au milieu toujours fixé sur l'établi, un mouvement de va et vient très rapide également contribut, à la bonne finition et pénétration de la poix, les brûlures sont obligatoires.
Il faut maintenant le rouler parfaitement, de deux façons, comme la première fois accroché sur l'établi et tourné sur le genou, ou au marteau, fixé par une pointe, à l'endroit de tenue du métal sur le manche, le ligneul est tenu par moitié par une main en position haute, et c'est le marteau qui est roulé et lancé sur le genou pour la torsade rapide du ligneul.
Il faut maintenant poser les soies, chacun a son procédé, soie fendue ou non, la meilleure manière et la plus solide est la pose " soie fendue ", jusqu'aux deux tiers de sa longueur. La soie se compose d'une tige avec d'un bout une boule qui représente le bulbe pileux, et de l'autre plusieurs petites branches, les diviser en deux en nombres égaux, puis tirer de chaque côté pour l'ouvrir jusqu'au deux tiers. l'extrémité du fil est inséré dans cette fourche, la soie est tenue de chaque côté par le pouce et l'index, le fil tenu entre les autres doigts et la paume de la main, la soie est torsadée entre les deux doigts, puis lachée et le fil tout seul vient s'enrouler pour faire un mariage de torsades, soie et fil entremêlé. Il est enroulé jusqu'au deux tiers de la soie, au moment ou fil et soie sont de diamètre légèrement inférieur, à celui du fil complet. A cet endroit l'ensemble est percé avec une alêne, l'extrémité de la soie est passée puis retournée, pour un verrouillage des branches de la soie et du fil.
C'est tout un art de faire un ligneul, particulièrement la pose de la soie, il en existe plusieurs manières, toutes un peu comparables et un peu différentes, avec la possibilité de deux verrouillages.
C'est maintenant, la couture, le cordonnier doit tenir sans jamais les lâcher en même temps les deux soies, l'alêne d'un côté et la manicle passée sur l'autre main, elles servent à serrer le fil entouré sur l'alêne et sur la manicle. Un premier trou est fait petit, dans ce dernier le fil est lissé par morceaux par va et vient sur toute sa longueur, la couture doit être faite le plus rapidement possible, il ne faut pas que la poix durcisse et ne permette plus le coulissement des deux fils, tout colle d'une manière abominable de partout, le meilleur moyen et les conseils de nos maîtres, se passer la main dans les cheveux, avec tous les ennuis que cela comporte.
Combien j'ai vu d'apprentis et moi même à mes débuts, casser le fil au premier point, à la jonction Soie ligneul, endroit de fragilité. Tout est à recommencer, on ne peut refixer une soie sur une extrémité cassée, pas question de faire comme nos bottiers modernes.
Je l'ai dit, lors de concours, les plus performants cousaient un pied en une douzaine de minutes, ( n'oublions pas l'appellation de certains coutures " petits points " ) le ligneul fait et lissé dans le premiers trou. Ce qui était un travail quotidien pour nous est devenu une prouesse technique maintenant.
Très amicalement,
Tictac

3 commentaires:

  1. Bonsoir,

    Quel plaisir de lire ce texte ! Je suis né en 1946. Je rédige mes mémoires. Mon père était cordonnier marchand de chaussures. Son père était "cuirs-crépin". J'ai revu les gestes de mon père, la préparation du ligneul, la poix...etc. J'ai son alène courbe à côté de mon écran, toujours sous mes yeux ! Quel nom avait la pince en bois qui tenait l'ensemble à coudre ?
    Il y avait chez nous une 'machine black' (je dois mal écrire le nom) que je n'ai jamais vu fonctionner. Elle a dû partir à la ferraille. Quel est le nom de la pièce de bois dans laquelle était la bigorne ?

    Serait-il possible de faire une vidéo d'un ressemelage selon les étapes que vous présentez ? est-ce qu'il en existe ?

    Je vais vous citer sur mon blog
    http://lefenetrou.blogspot.com

    Encore merci... je vais faire de beaux rêves ce soir.

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  2. Bonsoir,
    Cuir et crépins, cordonnier chausseur, quelle lignée ! bon sang ne saurait mentir pourtant vous êtes allez apparamment vers d'autres cieux.
    Des mémoires, si vous publiez, si vous parlez de vos ascendants cela m'intéresse bien evidemment.
    Juste retour de politesse,je suis venu faire un tour chez vous, j'y retournerais, je n'en ai pas encore apprécié l'ampleur et la qualité !
    Cette pince qui sert à tenier les parties de cuir à coudre, est plus utilisée dans la sellerie, maroquinerie et la bagagerie, les cordonniers bottiers dans le cadre de leurs travaux s'en servent plus rarement, ou alors lorsque comme moi ils accèdent à d'autres secteurs du travail du cuir. Son nom je ne pense pas dire de bêtises, est tout simplement " Pince à coudre de sellier "
    Vous évoquez une machine à coudre Blake, et la bigorne, pour la petite histoire cette machine à coudre, avec son pied " bigorne " sur lequel s'enfilent les chaussures à coudre de dehors en dedans, est la seule qui partage ce nom bigorne manuelle et celle mécanique en appellation.
    La bigorne, je suis en train de finir deux sujets qui en parlent, car c'est un des outils principaux du cordonnier bottier,
    les enclumes, qui regroupes, tous les pieds, bigornes, col de cygne, de ces professions,
    La position de travail du cordonnier, du bottier, assis / debout, car de cette transformation de la
    bigorne en étau, le cordonnier a vu sa position de travail assis, passer au labeur debout, mais pas le bottier.
    La bigorne est faite en deux partie, pied en fer, sur lequel il s'emmanche son ( manche ) le pied en bois son nom.
    Des vidéos merveilleuses de ces exécutions existent, sur des foras, des sites et sur ce lien
    http://www.youtube.com/ conservatoire dynamique des gestes techniques

    En espérant vous avoir renseigné un peu. Merci pour vos compliments, toujours agréables à prendre plutôt que des coups de bâtons. Que vos rêves soient merveilleux,toujours à votre disposition,
    très amicalement.

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  3. Bonjour !

    Pourriez vous nous indiquer quel fil de lin acheter pour réaliser son ligneur s'il vous plait ?

    Merci :)

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